dimanche 28 juillet 2013

Idolâtrie polypanthéiste

« Le bon pape François a mis en garde les jeunes du JMJ de Rio contre l’idolâtrie. Le crime par excellence de l’Ancien Testament, bien pire que le vol, le viol, le meurtre. En fait on comprend que presque tous les vices sont des conséquences de  l’idolâtrie. Pour ma part, je définirais la chose ainsi : idolâtrer, c’est s’arrêter en chemin.  Dans la passion fougueuse de la jeunesse, on est prêt à tout donner, jusqu’à sa vie, pour une cause, et on trouve ça beau. Mais lorsque cette cause est un bien matériel, une fortune, une carrière, il y a un déséquilibre malsain…  C’est avoir une bien piètre vision de la nature humaine que de penser qu’on vit pour ces platitudes que la société nous propose comme absolus.

Allons-y donc avec quelque chose plus élevé : l’art et la science. Nietzsche, Schopenhauer et les romantiques allemands ont défendu l’idée de l’art comme moyen d’atteindre l’absolu… On vit avec les contrecoups de cette vision qui nous fait voir Jimi Hendrix, Kurt Cobain ou Amy Winehouse comme des martyrs, tandis qu’ils ne seraient que de misérables junkies s’ils avaient été autre chose que des chanteurs. Même chose pour les autres arts. La figure de Nelly Arcand me vient en tête. Une idole est un faux dieu. Et un faux dieu exige des sacrifices humains. C’est quelque chose qui n’a pas changé depuis l’Antiquité, même si ça peut paraître moins évident. Les faux dieux veulent mort d’homme, et c’est ainsi qu’il est possible de les démasquer, de distinguer une passion saine de l’idolâtrie. Tout suicide cache un faux dieu qui a eu besoin de la vie de la victime qui s’est elle-même immolée.

Soit on se sacrifie soi-même, comme dans les exemples mentionnés ci-haut, soit on en sacrifie d’autres. Je ne nommerai pas les faux dieux qui ont besoin de réduire des populations entières à l’esclavage pour fonctionner. Bon d’accord, il s’agit du capitalisme globalisé des sweatshops. À l’opposé, le dieu-communiste a eu besoin de 100 millions de morts pour se sustenter pendant 75 ans. Et il semblerait bien que le dieu de certaines branches que je veux croire corrompues de l’Islam soit particulièrement friand de la chair d’infidèles déchiquetée par les bombes.

Mais je suis sur le terrain économico-politique et j’ai dit que je parlerais d’art et de science.

Tous les chemins mènent à Rome signifie que si on s’engage assez avant sur une voie, on va déboucher sur l’Église une et apostolique. C’est ce que nombre de romantiques Allemands ont expérimenté. Si on ne s’y rend pas, c’est qu’on s’est arrêté en chemin et telle est l’idolâtrie. On peut trouver beau de vouloir mourir pour une cause, mais il n’y a qu’une seule Cause. Le reste est conséquence. Idolâtrer, c’est prendre la conséquence pour la cause. La créature pour le Créateur. Il y a des degrés. À l’étage inférieur, on va idolâtrer une créature sortie de mains d’hommes (une figurine, une voiture ou un système économique), ce qui est d’une vulgarité innommable. Juste au-dessus, on va prendre une créature de Dieu pour Dieu même : un homme, le soleil, Mother Earth, ou encore, comme dans le cas de Richard Dawkins, une loi de la nature. Quelques dérives eugénistes au XXe siècle nous ont laissé entrevoir de quels types de victimes ce mécanisme-de-fonctionnement-fait-dieu pourrait avoir besoin d’ingérer pour pouvoir prétendre se maintenir au niveau du divin.

La science et l’art sont parmi les activités les plus nobles auxquelles l’homme puisse s’adonner en ce qu’elles pointent vers un chemin qui les transcende. Mais l’homme occidental ne veut pas s’engager sur ce chemin. Telle est pourtant l’utilité fondamentale de l’activité dans laquelle il s’engage corps et âme et au-dessus de laquelle il place toute autre activité. S’il ne l’assume pas, il est idolâtre.

Dans le cas de la science, cette idolâtrie a donné lieu à une première dans l’histoire humaine. Devant l’impossibilité manifeste qu’un tel niveau d’organisation soit le fruit du hasard, l’astronome idolâtre a décrété (en sachant bien qu’il n’aurait jamais aucun moyen de le vérifier) qu’il existait une infinité d’univers ayant tous des lois de fonctionnement différentes. Ainsi est apparu, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, le poly-panthéisme. Drôle d’époque, indeed. » 

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